Publié le 16 avril 2015 dans L’ECHO
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L’envolée symphonique d’Ozark Henry
vers un Grammy Award.
- Los Angeles
- De notre correspondante
Rencontre exclusive avec l’icône de la musique pop rock belge à Los Angeles. Ozark Henry y a présenté son nouvel album Paramount, avant une escale à New York. A la clé : une possible nomination aux Grammy Awards.
Douce matinée dans la Cité des Anges et effervescence habituelle sur les boulevards de Hollywood. Le soleil réchauffe déjà Vine Street, à deux pas du Walk of Fame. Piet Goddaer nous accueille sur une terrasse à la végétation luxuriante, dans le complexe d’appartements dans lequel il loge. Le chanteur courtraisien, aux maintes récompenses, parle un français timide et délicat. Il rayonne dans une veste noire brodée d’or, création d’Ann Demeulemeester.
Voilà une semaine qu’il a débarqué sur la côte Ouest pour présenter Paramount, son dernier opus, enregistré avec l’Orchestre national belge. Un album sublime, sorti début mars en Belgique et au Pays-Bas, dont le titre évoque, à lui seul, le moment de volupté de l’écoute à venir.
Parmi d’autres professionnels de la musique, nous avons eu le privilège, d’assister à une session d’écoute exceptionnelle. Conviés au Voila!Studio (NDLR galerie d’art de la belge Katrien Van der Schueren), les convives reçoivent des secousses symphoniques, dès le premier morceau lancé.
Assis dans des fauteuils de concert confortables, la vingtaine de privilégiés savourent, d’emblée, la haute qualité sonore. Vespertine, magie cristalline. Love is free to interfere, envoûtement philharmonique. An Angel fell it’s done, complainte somptueuse. Une berceuse à la voix tendre et rauque. Contraste grave vers une montée lumineuse. En douceur, Out of this World réveille du songe, vers une explosion des cordes. Vingt minutes, hors du temps, de l’espace. Un voyage dans les gammes de possibilités instrumentales. Le compositeur flamand offre un produit indéniablement original, entraînant le public dans une aventure musicale inédite.
En effet, Paramount est le premier album belge enregistré et masterisé aux normes les plus élevées du son surround 9.1. Saisissantes, les nuances du son 3D ! Nous ne sommes plus sur La Brea Avenue mais instantanément projetés au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, là où l’histoire a débuté. Face aux nonante musiciens, le spectateur emporté par la pureté du son, prend la place du chef d’orchestre. Expérience surprenante et unique !
« La musique, c’est de l’émotion et de l’espace. Et c’est l’espace le plus naturel que tu puisses imaginer. L’Auro-3D est simplement la plus naturelle des manières pour écouter de la musique. » confie l’artiste.
Primordial comme son nom le signifie, Paramount se révèle bien une création suprême. Le projet a débuté en 2012 lorsque Piet Goddaer collabore avec l’Orchestre national de Belgique, à l’occasion du septante-cinquième anniversaire de l’institution. Quatre chansons sont alors offertes pour un concert privé au Palais des Académies. Pas de guitare électrique, pas de groupe. Uniquement le son intensément riche de l’orchestre, jumelé à la voix a cappella d’Ozark Henry. Fusion réussie.
L’histoire est trop belle pour s’arrêter là. L’ONB, l’esprit éveillé, donne carte blanche à l’artiste pop-rock, pour une série exceptionnelle de concerts. Une première dans l’histoire de la musique belge : hommage est rendu à un artiste non issu du répertoire classique, sous la baguette du chef Stef Blunier. (NDLR Beethoven Orchester, Opéra de Bonn)
Lors de trois représentations données à Bruxelles, Charleroi et Ostende, en mars dernier, les musiciens de l’ensemble ont ainsi exploré un nouveau répertoire et découvert les titres d’Ozark Henry, dont les arrangements ont été confiés à Arnould Massart. « Il a fait ça d’une manière fantastique, c’est un grand artiste pour traduire toutes les couleurs en balance. » sourit Piet.
Le programme musical s’est ainsi gravé naturellement sur CD et s’offre depuis aussi sur vinyl, digitalement, et évidemment en pure audio Blu-ray, incluant l’Auro 9.1. Un voyage temporel de vingt ans avec des titres du passé et quatre nouveautés dont Maybe, existentielle ballade teintée de la voix de Laura Groeseneken.
A Los Angeles, la séance d’écoute touche à sa fin. Sun Dance, dernier morceau en 3D : le son se déroule tel un tapis de velours sur lequel se pose délicatement la voix d’Ozark Henry.
A la sortie, Mattie Safer, ancien batteur du groupe The Rapture, laisse exploser son ressenti :
« C’est un superbe projet musical, combinant l’intimité et la profondeur de la voix de Piet avec la puissance montante d’un orchestre expérimenté. J’aime le projet et le son 9.1 qui le mène bien plus loin, j’ai pu sentir le dessus de mon crâne frissonner lorsque les violons se sont envolés. En somme, c’est une expérience incroyable. »
La semaine aux Etats-Unis est chargée pour l’ami Goddaer. A l’ombre d’un palmier, il nous dévoile ses intentions américaines. « Aujourd’hui, je raconte l’histoire à Los Angeles et à New York parce que Darcy Proper, sommité du mastering qui a collaboré à Paramount, m’a dit que cet album est le meilleur qu’elle ait jamais réalisé. Elle m’a encouragé à concourir pour un Grammy. » Et l’Américaine expérimentée sait de quoi elle parle, elle a déjà été nommée neuf fois et a remporté trois « Best surround sound album ».
C’est dans cette même catégorie que Paramount pourrait briller à la célèbre remise des Grammys à Los Angeles, d’ici quelques mois. Le challenge pour Ozark Henry et son équipe (dont Ronald Prent, superviseur son) se joue avant août. Avant ce mois butoir, il leur faut sortir, physiquement, le disque -et non pas digitalement- sur le territoire des Etats-Unis. Une sortie américaine est indispensable pour la qualification à la course au trophée.
Durant ces dix jours, entre L.A. et NYC, Piet et son manager, Robbe Demuynck rencontrent les labels et les publishers. « Nous sommes au tout début de l’histoire, dès que Paramount se vendra aux Etats-Unis, nous envisagerons simultanément la promotion vers la presse, les écoutes dans les cinémas superbement équipés ici, la diffusion du documentaire relatant l’aventure de Dimitri Van Zeebroeck, en cours de préparation et des shows en life. » enchaîne l’enthousiaste Robbe.
Darcy Proper leur a donné à tous les deux la grande espérance de se déployer aux USA. Et au manager de poursuivre : « Nous espérons des collaborations avec, notamment, le Los Angeles Philharmonic Orchestra. »
Les déçus du mois de mars -qui n’ont pu assister aux trois dates rapidement complètes, pourront se consoler au Lotto Arena d’Anvers, le 27 novembre prochain. L’expérience symphonique se réitéra avec une dimension visuelle, cette fois-ci.
« La salle offrant de plus grandes possibilités, nous ajouterons des technologies très avancées, de haute qualité. Absorber le moment présent à travers les technologies », lance le chanteur.
L’occasion de découvrir We can be heroes, la splendide reprise de David Bowie. Piet, n’avait-t-il pas été surnommé le jeune Bowie flamand par les Inrockuptibles, en 1996 ?
L’agréable entretien prend bientôt fin sous la douceur californienne et les sons de Paramount, un album singulier et ambitieux. « Je voulais expérimenter toutes les couleurs possibles», conclut Piet. Réussite absolue harmonisant puissance, dynamisme et sensibilité.
Nous sommes charmés. La beauté de la portée à l’état pur. Le partage de l’orchestre, pas celle de son ombre. Sa richesse. Le Courtraisien, l’œil pétillant, osent des bribes d’émotions aux accents néerlandais, avant de se quitter : « L’intention de partager les milliers de nuances », « La sensation pas depuis la salle mais dans l’orchestre ». « C’est généreux, le partage de vraies émotions avec plus de cent personnes impliquées ».
Un cross over intense et remarquable qui mènera peut-être l’artiste belge jusqu’au Grammys.
Ce n’est pas un rêve américain pour Piet, il n’en a pas. « C’est aussi bien de travailler pour comprendre le monde et la vie. Moi, j’ouvre la porte des opportunités. »
En février 2016, puisse celle des Grammy Awards s’ouvrir pour le talentueux auteur-compositeur-interprète, au palmarès déjà étoilés de six albums, de disques de platine et de tournées à guichets fermés.
Que l’envolée symphonique d’Ozark Henry se poursuive au son de la citation qu’il pose dans le carnet de son album : Respect each individual, harmony is Paramount.
Magisophienne
Crédit Photo : Dominic Verhulst
Infos :
Single : At the Sea, sortie le 24 avril.
Album : Paramount, chez Sony.
Concert : Lotto Arena d’Anvers, le 27 novembre.