Publié le 28 décembre 2015
SUD PRESSE
L’article sur Enrico Macias a enfin été publié. Le voici :
Voici l’intégralité de l’entretien :
Enrico Macias réunit les enfants de tous pays en Amérique.
A l’occasion de son spectacle au Saban Theater de Beverly Hills, Enrico Macias a accepté de nous accorder un entretien exclusif depuis Los Angeles. Le chanteur, qui a célébré ses 50 ans de carrière en 2013, se livre avec authenticité.
De notre correspondante, Magisophienne
En septembre dernier, Gaston Ghrenassiade de son vrai nom, chutait malencontreusement dans sa salle de bain. Résultat : hospitalisation et opération d’une triple fracture du bras droit. La sortie attendue de son dernier album Les Clefs est ainsi repoussée à début 2016. Cependant, que les fans se réjouissent, l’Oriental à la voie ensoleillée se confie sur ses plus grandes blessures dans son livre L’Envers du ciel bleu, sorti le 14 octobre dernier.
A l’aube de ses 77 ans, toujours aussi engagé pour la paix, l’artiste franco-algérien de confession juive, revient aussi sur son positionnement face à la montée de l’extrême droite en France : « Si Marine Le Pen est élue présidente, je quitte la France », déclarait-il récemment sur BFM TV.
Sur la terrasse du Beverly Hilton, entretien avec un Enrico attachant, en grande forme, remis de sa chute et heureux de s’être produit à New York dimanche dernier et à Los Angeles, ce mercredi.
Ce n’est pas la première fois que vous venez à Los Angeles ?
Ah non ! Je suis venu pour la première fois aux Etats-Unis en 68, à New York et en 70 à Los Angeles. Depuis, j’ai dû m’y produire une quinzaine de fois.
Qu’appréciez-vous dans la Cité des Anges ?
La proximité avec le mythe du cinéma, les grands acteurs, Hollywood. Les chanteurs mythiques et les studios célèbres. C’est bien plus cool et calme que New York (que j’aime aussi pour son énergie). Mais LA, ça me rappelle un peu le sud de la France où j’ai une maison.
Vous êtes aussi un acteur, avez-vous des projets ou envies sur le grand écran ?
J’ai des envies mais pas encore à la mesure de ce que je souhaite. Le cinéma, ce n’est pas comme la chanson. C’est dur de choisir, de s’émerveiller. Tout le monde me demande des rôles comiques. Sur scène, je fais pleurer et au cinéma, je fais rire ! Oui, j’aimerais un rôle dramatique mais le plus important, c’est un rôle dans lequel je serais le meilleur.
Pourquoi venir chanter à Los Angeles ?
Los Angeles, c’est un rendez-vous incontournable, j’y viens en moyenne tous les trois ans. LA, c’est la diversité. Il y a bien-sûr les Américains qui me suivent, la communauté juive, française et francophone, les Musulmans et tous les enfants d’Algérie et du Maghreb et beaucoup d’Arméniens, aussi. Ce sont les premiers au box office qui réservent leurs tickets pour mes concerts. Je réunis des communautés qui à-priori pourraient être en conflit en sortant de mon spectacle. Je dis souvent que la paix je l’ai vue mais que dans mes spectacles. Mon public, ce sont les enfants de tous les pays (rire) !
Que nous réserve votre prochain album ?
Ce sont des nouvelles chansons, j’y suis seul, cette fois ! (En 2012, son dernier album Venez tous mes amis, reprenaient ses plus grands titres en duo, NDLR). Le titre Les clefs, c’est pour ouvrir les portes du passé et de l’avenir. Je me suis entouré d’autres compositeurs et auteurs pour le réaliser, comme Marc Estève, par exemple. Et toujours avec mon fils Jean-Claude aux arrangements, avec qui je collabore depuis une dizaine d’années.
En octobre, vous avez démarré la promotion de votre livre autobiographique L’Envers du ciel bleu. Pouvez-vous nous en confier la trame ?
Je l’ai écrit en collaboration avec Bertrand Dicale. C’est grâce à lui que j’ai pu dire des choses fantastiques qu’il a ensuite mises en mots. J’ai une image festive, j’ai voulu montrer à mes enfants, petits-enfants mais aussi à mon public, que derrière cette joie de vivre et la fête que je prône, il y a la douleur profonde des événements que j’ai vécus : une face cachée, l’autre côté du ciel bleu. J’y aborde, notamment, la perte de ma femme Suzy (décédée en 2008, après 47 ans de mariage, NDLR), la mort tragique de mon beau-père en 1961, Raymond Leyris dit Cheikh Raymond, mon héros. J’y parle aussi de mon Algérie que j’ai dû quitter en 1961 et la douleur de n’avoir jamais pu y retourner. Mais aussi de la douleur de ce qui se passe dans le monde, l’injustice. Je n’ai pas peur pour moi, j’ai peur pour ceux que j’aime. La mort, la maladie. Depuis que ma femme est partie, je n’ai plus peur de mourir.
Lors d’un entretien avec un journaliste français de BFM TV, vous vous êtes exprimé sur Marine Le Pen. Confirmez-vous vos propos de quitter la France pour Israël si elle arrive au pouvoir ?
Oui ! Je crains le racisme, l’antisémitisme… et l’antisémitisme, ce n’est pas que contre les Juifs, ce sont aussi les Musulmans. J’encourage les communautés musulmane et juive à quitter la France si Marine Le Pen accède à la Présidence de la France.
On vous qualifie volontiers de chanteur engagé, l’êtes-vous ? Qu’est-ce que cela signifie ?
Oui, je le suis. Je ne profite pas uniquement de mon succès mais je suis le témoin de mon temps, je témoigne de tout ce qui se passe dans le monde. Je m’engage principalement pour les enfants malades mais aussi les valides qui n’ont pas les moyens de se distraire, de prendre des vacances, je leur rends visite.
L’artiste franco-algérien nous invite à terminer la rencontre sur la terrasse de l’hôtel pour savourer un cigare cubain. Plaisir qu’il affectionne particulièrement, moment propice pour aborder notre pays. « La Belgique, j’adore, c’est un peuple très tolérant, le seul pays qui ait donné mon nom à une école. » Effectivement, depuis 2005, l’école fondamentale de Melreux, dans la commune d’Hottton, porte fièrement le nom Enrico Macias. Pour la première fois, l’artiste a accepté de prêter son patronyme, séduit par le caractère cosmopolite de la population de l’établissement.
Alors qu’on s’apprête à le quitter, il reçoit un SMS. L’oeil ému, le Havane entre les doigts, Enrico s’exclame: « C’est de mon ami Taoufik Bestandji, mon chef d’orchestre de musique arabo-andalou ». Heureux, sur un ton tendre, le chanteur lit : « Merci Gaston pour ce bel hommage à notre musique et à notre grande famille. Je veux dire pour l’ouvrage. Amitiés fraternelles. »
MAGISOPHIENNE
@magisophienne
L’Envers du ciel bleu, paru aux éditions Le Cherche Midi, sorti le 14 octobre 2015