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Julian Assange arrêté, Notre-Dame de Paris en feu et voilà l’émotion du peuple qui s’enflamme • On s’émeut, on ne s’émeut pas. On critique. On ne comprend pas vraiment. Mais on s’exprime, sans réfléchir. Et on le fait en un clic, en 200 mots maximum, sous l’effet d’une émotion. Il faut absolument donner de sa voix, faire partie du mouvement frénétique; pourquoi se priver d’un défoulement gratuit alors que les réseaux sociaux nous en donnent l’occasion ? On transfère des photos-choc avec des mots malheureux, sans chercher à saisir les enjeux. L’expression que j’encourage n’est pas celle de l’émotionnel sans fond. Sans fondement. Depuis mon arrivée à Bruxelles, j’observe. J’observe le peu de gens qui s’émeuvent de l’arrestation, jeudi dernier, de Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, qui a mis sa vie en danger pour révéler, en véritable journaliste, les dysfonctionnements d’un monde vacillant d’abus. On parle de lui, sans savoir. Il est critiquable, assurément, qui ne l’est pas, mais on peut retenir son courage et sa véritable intention (mission). Au lieu de cela, on colporte les pires mensonges à son sujet (merci à une frange des médias traditionnels et autres abuseurs d’avoir organisé cette débâcle pour mieux minimiser ce qui arrive au lanceur d’alertes). De son approche activiste au journalisme d’investigation, Assange est un héros pour son message qui révèle les corruptions et déceptions cachées derrière les portes opaques de nombreux gouvernements, corporations et même, de certaines religions. Pendant qu’une certaine presse traditionnelle sert, en boucle, le même fil d’actualités qui suscitent une seule émotion, toujours la même -anxiogène pour mieux manipuler- chez le pathétique suiveur qui ne cherche rien. Juste à ingérer la soupe populaire d’informations biaisées qui lui est servie. Fainéant ! Quelques jours plus tard, les Français attendaient le discours d’Emmanuel Macron. Une heure avant que le Président de la République ne s’exprime, un des monuments les plus connus de Paris s’embrase. Tout s’arrête et les projecteurs du monde entier se braquent sur les flammes ! Coïncidence ? Conspiration ? Attentat ? C’est effectivement suspect, on peut le constater. Manipulation ? Mensonge ? Et voilà toutes les théories qui circulent en opposant les individus. On se recueille, on fait un don, on témoigne. Les autres s’insurgent, et crient au complot, bien haut les boucliers des opprimés, des oubliés. Blanc ou noir, il faut choisir. Tiens, une autre technique de manipulation, la division ! La nuance, privilège de ceux qui pensent ? Misérable hérétique, prends garde à toi ! On peut à la fois se désoler de la perte d’une partie d’un patrimoine immémorial et s’étonner de la déferlante de millions pour le reconstruire. Blanc ou noir, un camp ou l’autre. Il faut choisir et se positionner. Et on le fait allègrement, sans rien savoir. Il faut tout opposer et s’en persuader, en suivant, comme des brebis égarées, l’hystérie collective. On ne parle plus que de ça, Notre-Dame partout. Et le reste ? On oublie pour l’instant. Et on ressasse une recette d’abus de poudre aux yeux qui fonctionne et a fait ses preuves, encore et encore. J’observe. Je ressens aussi une émotion, puis, une intuition : c’est effectivement étrange, très étrange, oui, même suspect. Tout est possible, surtout les manipulations en haut lieu. Il nous faudrait un Julian Assange et WikiLeaks pour savoir ce qui se passe réellement mais il est en prison ! Cela viendra, sûrement, on saura. On peut tuer un messager mais pas son message. Pour ma part, je suis choquée, interloquée, oui, mais je n’ai entrepris aucune recherche pour pouvoir me proclamer sur ce qui se passe. Je sais simplement que la priorité c’est notre planète qui suffoque et notre Humanité qui se meurt. Ce sont les hommes qui souffrent et crèvent de faim, de guerres, d’abus. Alors entre les pierres et le passé, je choisirais l’humain, le présent et l’espérance d’un futur. Et pendant que l’on discute du bien-fondé des dons des plus grosses fortunes, que fais-tu, toi, affalé.e dans ton fauteuil à regarder les chaînes info qui t’abrutissent ? L’expression, c’est confier son émotion, certes, mais, une fois l’émotion passée, s’exprimer sans pensée, sans preuve, sans source fiable, c’est simplement une parole qui s’envole dans les trous noirs de l’ignorance et qui renforce les plus forts (que tu sembles sans cesse vouloir critiquer). Des mots qui ne servent que l’agitation des abrutis … et à l’arrivée, des mots qui servent les pouvoirs en place qui, j’en suis convaincue, manipulent. Alors, intéresse-toi, peut-être, à qui est Julian Assange, à ce que son arrestation représente pour les enjeux de la liberté de la parole; intéresse-toi, peut-être, à ceux qui se battent, au quotidien, pour sauver la planète. Et peut-être, réfléchis, oui, réfléchis, seul.e, documente-toi, en dehors des médias traditionnels. Prends du temps avant de copier-coller des photo-montages. Ressens ton émotion mais après, agis en pensée, aussi, avec des preuves irréfutables à l’appui. Pendant que tu postes à tout-va des images sensationnelles sans les avoir vérifiées comme un soûlard au café du coin; que fais-tu, toi, dans ta propre existence, à part vociférer et te plaindre ? Quelle(s) action(s) mets-tu en place, à part tes heures devant l’écran à tapoter des sornettes de cons. Noir ou blanc, sans savoir vraiment. Sans savoir que Julian Assange va peut-être passer sa vie en prison pour avoir, lui, poser des actes audacieux qui changent la face de l’histoire. Prends le temps, de ce fichu temps, pour t’informer correctement. Que ta parole serve le monde. Sinon, tu n’es qu’un mouton de Panurge dans un système malade dont tu serais alors responsable et je préférerais simplement que tu fermes ta gueule. L’expression, c’est aussi le silence, parfois. #lespossiblesavecsophie
PS : Notre livre sur Julian Assange, la biographie du fondateur de WikiLeaks, téléchargeable sur www.sophieradermecker.com/assange.html
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